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Écriture - vos créations


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il y a 15 minutes, DickInSon a dit :

C'est le prénom de la meuf envers qui tous les gars simp dans la première partie de Dracula c'est bien ça ? Sans spoiler plus loin, j'ai rarement vu un personnage aussi insipide, je pense qu'elle n'existe que pour valoriser Mina et une certaine idée de la féminité pure.

 

C'est elle, oui. Mais je pense que ce n'est pas qu'un faire-valoir pour Mina, elle est là pour incarner une tentation polyandrique et un dérèglement qui préparent son évolution ultérieure -ce que le film de Coppola a rendu tellement explicite que ça en devient complètement inintéressant, je trouve.

 

il y a 18 minutes, DickInSon a dit :

Je trouve que c'est déjà un rendu très riche pour une IA qui n'a que quelques mois... Franchement, je pense qu'il y a quelques professions qui risquent de sauter si on laisse ceci se développer 

 

C'est sûr, mais c'est sur la création visuelle que c'est le plus impressionnant actuellement, avec l'IA qui a gagné un prix, évidemment elles se contentent de recombiner différemment les traits d'œuvres existantes, mais ça fait suffisamment illusion pour remplacer un illustrateur humain à moindre coût. La prouesse technique est impressionnante, mais c'est idiot de chercher ça : dans un monde idéal, on aurait des IA pour lire nos mails, faire nos courses etc. pendant que nous on écrit/dessine ou ce qu'on veut, pas le contraire.

 

Bon, allez, je l'ai fait (spoiler sur Carmilla, si quelqu'un a l'intention de le lire) :

 

Révélation
Écris une réécriture de Carmilla de Joseph Sheridan le Fanu dans le monde moderne.
 

Il était une fois, une jeune femme du nom de Laura. Elle vivait dans une petite ville à la campagne, où elle menait une vie paisible et solitaire avec son père, un riche propriétaire terrien. Un jour, une jeune fille du nom de Carmilla est amenée chez eux après un accident de voiture qui a laissé sa famille blessée. Laura est immédiatement intriguée par Carmilla, qui est belle, mystérieuse et semble avoir un passé trouble.

Carmilla et Laura commencent à passer du temps ensemble, et Laura se rend compte qu'elle ressent une attraction inexplicable pour la jeune fille. Elle se rend également compte que Carmilla a des comportements étranges, comme éviter la lumière du soleil et se nourrir exclusivement de sang. Laura se met à enquêter sur le passé de Carmilla et découvre qu'elle est en fait une vampire, qui a été transformée il y a des siècles et qui a vécu éternellement en se nourrissant de sang humain.

Malgré ses réticences, Laura ne peut pas s'empêcher de ressentir de l'attraction pour Carmilla, qui lui révèle que cette attraction est réciproque. Les deux jeunes femmes commencent une relation passionnelle, mais Laura est constamment tourmentée par la culpabilité de soutenir une créature qui se nourrit de sang humain. Pendant ce temps, des disparitions étranges se produisent dans la ville, et Laura commence à suspecter que Carmilla est liée à ces événements.

Finalement, Laura décide de confronter Carmilla, qui lui avoue qu'elle a été obligée de se nourrir de sang humain pour rester en vie. Elle lui dit également qu'elle est à la recherche d'un remède pour sa condition de vampire, et qu'elle espère pouvoir un jour vivre une vie normale avec Laura. Cependant, des chasseurs de vampires, qui ont été alertés par les disparitions, arrivent à la maison de Laura et capturent Carmilla.

Déchirée entre son amour pour Carmilla et sa culpabilité pour ses actions, Laura se lance à la recherche de Carmilla pour tenter de la sauver, mais cela sera vain. Elle découvre que les chasseurs de vampires l'ont tué et elle se retrouve seule, avec son chagrin et sa culpabilité. Elle se promet de ne plus jamais s'engager dans une relation avec quelqu'un qui n'est pas entièrement humain, mais elle ne peut pas effacer les sentiments qu'elle a pour Carmilla.

 

Oui, bon, elle a copié/collé le bouquin de Le Fanu en remplaçant le château par une "petite ville" et en changeant un peu la fin, quoi. Du coup, ça va, mais elle avait la vie facile^^ Et elle adore envoyer des chasseurs de vampires sortis de nulle part à la fin :rolleyes:

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C'est... candide    

Je me suis demandé si l'IA de Chat GPT pouvait écrire mes romans à ma place Heureusement ou malheureusement, la réponse est clairement non      

Je viens d'écrire le scénario du siècle avec ChatGPT :   Si avec ça, j'ai pas l'Oscar... Prends ça, @Mitth'raw Nuruodo !   EDITH : par contre, pas hyper à l'aise avec les dates l

il y a 10 minutes, Mitth'raw Nuruodo a dit :

c'est qu'elle ait appelé son vampire Lucie

 

J'avais un doute et pas remis la main sur ton fichier pour vérifier, j'avoue.

 

Remarque, quand je vois ce qu'a donné la bio revisitée de Rammstein, le choix des prénoms doit se faire en checkant la liste des prénoms les plus donnés dans les années 60.

 

Donc l'explication de @DickInSontient la route. Dans le contexte d'une histoire de vampires, avoir une Lucie / Lucy Westenra ou une Mina Murray, c'est la ref attendue.

 

Pour ce qui est de la puissance de l'IA, franchement, je reste sceptique sur son impact réel. Je veux dire par là que c'est pas la première fois qu'une IA réussit à bluffer des gens à l'écrit. Il y a une décennie (ou un peu plus), une IA avait reçu un prix littéraire pour "son" roman. A l'époque, ça avait fait grand bruit puis plus rien.

 

Le seul aspect où peut-être il y a un danger pour des emplois, c'est pour les créations visuelles en général, mais surtout parce que, à mon avis, les gens sont accoutumés aux images simples de la pub, ou aux descriptions un peu cliché basées sur un imaginaire limité, propre aux blockbusters ou aux séries produites à la pelle.

 

A l'inverse, l'écrit littéraire (car on prenait cet exemple-là - je mets de côté tous les autres types d'écrits, qui sont nombreux, comme l'écrit journalistique, par ex. parce que c'est précisément un secteur où la sous-traitance a fait des ravages sur la qualité), donc je disais l'écrit littéraire nécessite un truc en plus, qu'on appelle souvent "style" mais qu'on ne définit pas vraiment, en tout cas, on ne peut pas clairement le définir positivement.

 

Pour moi, le "style" dans l'écrit littéraire, c'est pas juste la marque de fabrique de tel ou tel auteur. C'est pas une qualité magique, une âme, ou je-ne-sais-quoi. C'est une forme d'imperfection qu'on finit par apprécier en tant que lecteur; des petits trucs placés par-ci par-là, de manière intentionnelle ou non, pour brouiller le message. Ce que fait un auteur littéraire, un bon auteur littéraire, c'est montrer en permanence que son texte n'est pas juste un ensemble de mots qui ont un sens ensemble. Un peu comme si l'auteur mettait un filtre sur quelque chose qui pourrait être le produit d'une communication simple et directe... qui prend de la valeur grâce à ce filtre qui vient perturber la communication.

 

Or, je ne suis pas sûre qu'une IA puisse un jour inclure dans son algo un degré d'imperfection dans la langue pour rendre un écrit vraiment littéraire puisque ça va à l'encontre de son mode d'apprentissage, ça va contre l'idée d'efficacité et de clarté.

 

Certes, en restreignant une IA à un corpus strictement littéraire, on pourra peut-être retrouver ces petites imperfections qui font le style, mais à l'écrit, l'imitation sans subversion est vite sans intérêt parce qu'on la repère très vite, on s'ennuie très vite, et on est pas bien loin du plagiat. Il suffit de voir ce que ça donne quand Antoine Daniel ou Fred demande à l'IA d'écrire un épisode de WTC ou JDG, ou plus parlant encore, quand Jean Massiet la lance sur un texte promotionnel pour sa propre émission: on retrouve des segments entiers qu'ils ont eux-mêmes dits ou écrits. A ce niveau-là, on n'est même pas sur de l'imitation mais de la simple redite.

 

 

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il y a 25 minutes, Mitth'raw Nuruodo a dit :

C'est elle, oui. Mais je pense que ce n'est pas qu'un faire-valoir pour Mina, elle est là pour incarner une tentation polyandrique et un dérèglement qui préparent son évolution ultérieure -ce que le film de Coppola a rendu tellement explicite que ça en devient complètement inintéressant, je trouve.

 

 

Entre temps je suis allée vérifier si je ne me trompais pas (je l'ai lu il y a deux ans grand max mais j'ai hésité) et je suis tombée sur un blog d'analyse qui disait que Lucy

 

Révélation

présentait la femme frivole, là où à contrario Mina est plus calme sur ses relations ; je pense qu'il y a volonté de mettre en opposition la femme "de petite vertu", qui se fait défoncer par le vampire et se retrouve après la mort à à sucer le sang des enfants qu'elle n'a pas pu faire, comme une sorte de punition divine, une errance de regrets et de remords, et la femme sérieuse en amour qui est capable de surmonter la tentation parce qu'elle est plus en adéquation avec des valeurs traditionnelles et sort "récompensée" de son attitude antérieure

 

Après le truc allait plus loin en disant que Lucy était le début de Lucifer perso je pense juste que c'est rapport à sa joie de vivre elle est lumineuse, mais c'est peut-être pas si con que ça

 

 

il y a 25 minutes, Mitth'raw Nuruodo a dit :

Oui, bon, elle a copié/collé le bouquin de Le Fanu en remplaçant le château par une "petite ville" et en changeant un peu la fin, quoi. Du coup, ça va, mais elle avait la vie facile^^ Et elle adore envoyer des chasseurs de vampires sortis de nulle part à la fin :rolleyes:

 

 

Si tu faire une réadaptation de la réadaptation, tu finiras par tomber sur un simili de 50 shades of grey, continue

 

il y a 25 minutes, Mitth'raw Nuruodo a dit :

C'est sûr, mais c'est sur la création visuelle que c'est le plus impressionnant actuellement, avec l'IA qui a gagné un prix, évidemment elles se contentent de recombiner différemment les traits d'œuvres existantes, mais ça fait suffisamment illusion pour remplacer un illustrateur humain à moindre coût. La prouesse technique est impressionnante, mais c'est idiot de chercher ça 

 

C'est pas idiot dans le sens où le dessin est perçu comme un produit, c'est dommage dans celui où on le considère comme une oeuvre d'art

C'est dramatique là où certains artistes finissent par ne plus être crus quand ils prétendent avoir fait leurs oeuvres sans l'aide d'IA (et parfois même tu peux avoir des doutes). Le jour où l'IA sera capable de faire des mains, ce sera terminé pour faire la différence :D Et ce sera très rapide.

Je pense qu'on est dans la phase où tout le monde est fasciné par ce que sait faire l'IA et spam les réseaux de ses productions. Mais passée cette phase je me demande ce que ça donnera. Est-ce que les graphistes y auront recours ? Est-ce que certains même se feront passer pour graphistes ? Est-ce que graphiste sera toujours un métier ? Est-ce qu'on va juste avoir une surconsommation de visuels qui fera qu'on se foutra complètement de ce qu'on aura sous les yeux, tant ce sera du vu et revu, et au final on regardera vite fait des productions comme aujourd'hui on zappe dans une playlist spotify, sans en avoir jamais grand chose à faire de l'artiste ? Je pense qu'on est déjà à ce stade à vrai dire, l'IA ne fera que l'accentuer.

 

Mais ça c'est pour l'aspect "le dessin (ou toute production visuelle) a vocation à faire joli/être vendue pour son côté esthétique".

Ce n'est pas le problème de l'art. Je fais partie de ceux qui considèrent que l'art n'est pas censé être particulièrement beau ou esthétique, mais porteur d'une profondeur et d'un sens que l'IA ne devrait normalement pas encore être capable de trouver par elle-même. Tout comme la photographie a rendues obsolètes les prouesses techniques des peintres, qui n'ont pour autant pas cessé ni d'exister ni de se renouveler par la suite. 

...Après les IA seront peut-être capables de berner leur monde et de présenter une réflexion, c'est loin d'être impossible :(

 

 

il y a 25 minutes, Mitth'raw Nuruodo a dit :

dans un monde idéal, on aurait des IA pour lire nos mails, faire nos courses etc. pendant que nous on écrit/dessine ou ce qu'on veut, pas le contraire.

 

Non, jamais

Ou uniquement si ça devait fonctionner correctement et sans faille

Je donne pas cher de nous si on délègue des choses aussi vitales, surtout à une entité qui nous échappe peut-être déjà

Sans compter que les européens sont complètement à la ramasse sur le sujet, je suis pessimiste (comme toujours) (vraiment la question de l'art c'est goutte d'au dans l'océan qui arrive 😬)

 

Désolée pour la disgression, au final je pense que l'IA se démerde déjà mieux en écriture que moi.

Edited by Guest
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il y a 9 minutes, LudicrousC a dit :

J'avais un doute et pas remis la main sur ton fichier pour vérifier, j'avoue.

 

Remarque, quand je vois ce qu'a donné la bio revisitée de Rammstein, le choix des prénoms doit se faire en checkant la liste des prénoms les plus donnés dans les années 60.

 

Donc l'explication de @DickInSontient la route. Dans le contexte d'une histoire de vampires, avoir une Lucie / Lucy Westenra ou une Mina Murray, c'est la ref attendue.

 

Oui, c'est exactement ce que je me suis dit, et il y a l'habituelle connotation Lucie/lumière.

 

il y a 10 minutes, LudicrousC a dit :

Pour ce qui est de la puissance de l'IA, franchement, je reste sceptique sur son impact réel. Je veux dire par là que c'est pas la première fois qu'une IA réussit à bluffer des gens à l'écrit. Il y a une décennie (ou un peu plus), une IA avait reçu un prix littéraire pour "son" roman. A l'époque, ça avait fait grand bruit puis plus rien.

 

Ah bah tiens, je ne savais pas ou plus !

 

il y a 11 minutes, LudicrousC a dit :

Le seul aspect où peut-être il y a un danger pour des emplois, c'est pour les créations visuelles en général, mais surtout parce que, à mon avis, les gens sont accoutumés aux images simples de la pub, ou aux descriptions un peu cliché basées sur un imaginaire limité, propre aux blockbusters ou aux séries produites à la pelle.

 

Ça va quand même un peu au-delà de ça : pour rappel, c'est ce tableau, qui est sans surprise extrêmement classique, mais pas suffisamment pour qu'on puisse le différencier de ce qu'aurait fait un artiste humain, contrairement aux scénarios assez médiocres de Chat GPT (mais j'imagine ça ne vaut pas pour l'IA qui a eu un prix littéraire, du coup). En-dehors de l'imagerie facile des publicités et des affiches de blockbusters, je pense qu'une maison d'édition pourrait tout à fait y faire appel comme illustration, par exemple. De fait, il y a déjà des illustrations qui peuvent être achetées comme ça pour vingt balles.

 

il y a 16 minutes, LudicrousC a dit :

Or, je ne suis pas sûre qu'une IA puisse un jour inclure dans son algo un degré d'imperfection dans la langue pour rendre un écrit vraiment littéraire puisque ça va à l'encontre de son mode d'apprentissage, ça va contre l'idée d'efficacité et de clarté.

 

Hmmm, je pense que si tu la programmes pour repérer les schémas récurrents de textes ayant du succès, elle peut reproduire des imperfections qui participent du style, même si ce ne sera évidemment pas le sien. Je pense que la grosse différence, c'est que l'IA n'ayant pas d'histoire personnelle, elle ne peut pas être émue par quelque chose qui n'ait pas déjà été utilisé ailleurs, que ce soit sur la forme ou sur le fond, et est donc condamnée à reprendre ce qui a marché pour des créations existantes.

 

il y a 10 minutes, DickInSon a dit :

Entre temps je suis allée vérifier si je ne me trompais pas (je l'ai lu il y a deux ans grand max mais j'ai hésité) et je suis tombée sur un blog d'analyse qui disait que Lucy

 

C'est à peu près ça, oui, sauf que ce n'est pas dépeint d'une façon négative tant qu'elle est en vie, tout comme la sensualité de Dracula est attirante. D'une manière générale, le poids du conservatisme religieux dans Dracula paraît être là pour sauver la bonne moralité du roman malgré le sous-texte sexuel omniprésent (surtout vues les attirances de Bram Stoker lui-même), d'ailleurs les critiques de son époque ne s'y sont pas trompées et l'ont attaqué là-dessus.

 

(La dimension érotique n'était pas encore présente dans Le Vampire de Polidori, c'est avec Carmilla qu'elle est apparue, mais il devait déjà ses traits au fait que Polidori fantasmait sur son employeur Lord Byron...)

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Bon je me suis fait un kiffe, et y'a pas à dire l'IA manque franchement d'inventivité :ph34r:

edit : c'est trop tard pour corriger les fautes sorry

 

Révélation

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Je constate que Chat prend des libertés : l'homme et la femme deviennent un couple, et l'interdiction devient "des règles strictes". Je constate aussi que j'ai croisé assez peu de Draugr et de Guar ces derniers temps, ce qui explique pourquoi je n'ai pas encore acquis la sagesse. Ou bien les créatures sont plus humaines, qui sait.

Edited by Guest
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26 minutes ago, LudicrousC said:

Pour moi, le "style" dans l'écrit littéraire, c'est pas juste la marque de fabrique de tel ou tel auteur. C'est pas une qualité magique, une âme, ou je-ne-sais-quoi. C'est une forme d'imperfection qu'on finit par apprécier en tant que lecteur; des petits trucs placés par-ci par-là, de manière intentionnelle ou non, pour brouiller le message. Ce que fait un auteur littéraire, un bon auteur littéraire, c'est montrer en permanence que son texte n'est pas juste un ensemble de mots qui ont un sens ensemble. Un peu comme si l'auteur mettait un filtre sur quelque chose qui pourrait être le produit d'une communication simple et directe... qui prend de la valeur grâce à ce filtre qui vient perturber la communication.

 

Or, je ne suis pas sûre qu'une IA puisse un jour inclure dans son algo un degré d'imperfection dans la langue pour rendre un écrit vraiment littéraire puisque ça va à l'encontre de son mode d'apprentissage, ça va contre l'idée d'efficacité et de clarté.

 

Je suis assez d'accord avec ta notion de style / imperfection chez les auteurs, mais je pense qu'avec le temps cela pourrait être intégrer dans les IA. Comme tu le dis c'est pour l'instant contradictoire avec leur mode d'apprentissage (du moins, pour celle-ci), qui est limité à produire des textes grammaticalement corrects et qui ont un sens (grosso-modo). Mais justement en changeant son mode d'apprentissage, ou plutôt en y rajoutant différentes couches, je pense que ça deviendrait possible. Tu lui envoies des données sur quels auteurs les gens aiment; elle t'analyse ces "imperfections" (c.a.d ce qui ressort comme étant différent du schéma classique littéraire, ou qui se retrouve juste chez quelques auteurs); les classe en catégories, voire même en crée de nouvelles; et après te les applique comme des filtres sur les textes qu'elle produit. Un peu comme l'application de contraintes dans la modélisation scientifique.

Franchement, je trouve pas l’idée déconnante. En terme de faisabilité du moins, après je suis pas sûre qu'il y ait grand intérêt dans le domaine littéraire. Par contre au niveau marketing et pub... à mon avis il y a de l'avenir de ce côté-là.

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Il y a 15 heures, Highlander a dit :

Par contre au niveau marketing et pub... à mon avis il y a de l'avenir de ce côté-là.

 

Yes. Je lui ai aussi demandé de m'écrire des textes politiques, quand je lui demande ce qu'elle pense d'un sujet ça ne donne rien, elle se contredit et se contente de conclure qu'il y a débat, par contre quand je lui ai dit d'écrire un texte défendant explicitement l'action d'un chef d'État, elle m'a fait un argumentaire tout à fait correct, comme aurait pu l'écrire un humain -quand il faut juste synthétiser des données avec un angle donné d'avance, elle y arrive et elle fait même ça plus vite qu'un humain, ça peut marcher non seulement pour la publicité mais aussi pour le journalisme. Ceci dit, à l'heure actuelle, il faut quand même que le commanditaire connaisse le sujet parce qu'elle a déjà été surprise à raconter n'importe quoi pour meubler, en fonction de ce qu'elle pioche.

Edited by Mitth'raw Nuruodo
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1 minute ago, Mitth'raw Nuruodo said:

Yes. Je lui aussi demandé de m'écrire des textes politiques, quand je lui demande ce qu'elle pense d'un sujet ça ne donne rien, elle se contredit et se contente de conclure qu'il y a débat, par contre quand je lui ai dit d'écrire un texte défendant explicitement l'action d'un chef d'État, elle m'a fait un argumentaire tout à fait correct, comme aurait pu l'écrire un humain -quand il faut juste synthétiser des données avec un angle donné d'avance, elle y arrive et elle fait même ça plus vite qu'un humain, ça peut marcher non seulement pour la publicité mais aussi pour le journalisme. Ceci dit, à l'heure actuelle, il faut quand même que le commanditeur connaisse le sujet parce qu'elle a déjà été surprise à raconter n'importe quoi pour meubler, en fonction de ce qu'elle pioche.

 

Il me semble que c'est complètement normal non, parce que ChatGPT a justement été entraînée a ne pas prendre de parti politique..? D’après Wikipedia:

According to the BBC, as of December 2022 ChatGPT is not allowed to "express political opinions or engage in political activism".[22]

 

Mais aussi:

Yet, research suggests that ChatGPT exhibits a pro-environmental, left-libertarian orientation when prompted to take a stance on political statements from two established voting advice applications.

Je me demande si elle piquée cette tendance à ses utilisateurs :lol:

 

Et je me pose la question si cette interdiction s’étend aussi au domaine religieux, vu la réponse qu'a reçu Dickinson avec son histoire d'Adam et Eve.

 

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Il y a 9 heures, Highlander a dit :

Je suis assez d'accord avec ta notion de style / imperfection chez les auteurs, mais je pense qu'avec le temps cela pourrait être intégrer dans les IA. Comme tu le dis c'est pour l'instant contradictoire avec leur mode d'apprentissage (du moins, pour celle-ci), qui est limité à produire des textes grammaticalement corrects et qui ont un sens (grosso-modo). Mais justement en changeant son mode d'apprentissage, ou plutôt en y rajoutant différentes couches, je pense que ça deviendrait possible. Tu lui envoies des données sur quels auteurs les gens aiment; elle t'analyse ces "imperfections" (c.a.d ce qui ressort comme étant différent du schéma classique littéraire, ou qui se retrouve juste chez quelques auteurs); les classe en catégories, voire même en crée de nouvelles; et après te les applique comme des filtres sur les textes qu'elle produit. Un peu comme l'application de contraintes dans la modélisation scientifique.

 

Certes, mais on reste quand même dans le schéma où l'IA a un corpus précis puis en synthétise des règles. Simple imitation d'un style, ça peut se faire, mais savoir imiter sans subvertir, ce n'est pas du style. Il y a un Russe en 2008 qui avait fait faire par une IA une variation de Anna Karenine dans le style d'un auteur japonais. Le grand écart est bluffant, mais on peut pas en déduire qu'une IA puisse en avoir l'idée et encore moins qu'elle puisse le faire de manière à exprimer quelque chose d'autre que le texte produit.

 

Ce que je veux dire précisément, c'est qu'écrire dans un genre précis, c'est facile. Et plus le genre est prescriptif, plus c'est facile. Il y a 10 ans, un mec (Philip Parker, je crois) avait un prototype d'IA qui pouvait écrire des sonnets. (Pour info, le sonnet est un poème composé de 2 quatrains et 2 tercets, avec un schéma de rimes qui dépend du type de sonnet - italien ou français - et une structure plutôt stricte qui repose sur une surprise réservée à la fin - je résume viteuf.) Et son IA produisait des sonnets bien foutus, impossibles à dissocier d'un sonnet écrit par une personne, dans le sens où ils étaient aussi banals que ce pouvait écrire une personne lambda, qui décide de se coller à l'exercice en optant pour les variations habituelles.

 

Pour moi, le style est une chose rare, qu'on ne trouve pas en imitant mais au contraire, en arrêtant d'imiter. En apprenant les règles d'un genre puis en décidant de s'en affranchir partiellement ou complètement. Pour trouver son style, il faut savoir communiquer clairement dans la langue puis choisir de ne plus le faire. Il faut donc trouver une forme d'intentionnalité dans l'IA, et là, franchement, pas sûre qu'elle soit au niveau pour ça.

 

Il y a 10 heures, Mitth'raw Nuruodo a dit :

Ça va quand même un peu au-delà de ça : pour rappel, c'est ce tableau, qui est sans surprise extrêmement classique, mais pas suffisamment pour qu'on puisse le différencier de ce qu'aurait fait un artiste humain

 

D'après le mec, c'est une parmi des centaines de variations de la même image. Là, il s'agit d'un procédé sélectif bien plus sévère qu'un éditeur qui réajuste ce qui ne va pas dans un roman. Ce que je veux dire, c'est que pour transposer ça à l'écrit, il faut imaginer une IA à qui on commande une centaine de romans avec les mêmes demandes initiales, puis on sélectionne celui qui a l'air pas mal... après avoir lu tous les autres pour comparer!

Or, là, c'est pas juste  la puissance d'une IA qui est à l'oeuvre dans l'image mais aussi le miracle du hasard qui tombe bien (puisqu'on peut plus facilement produire des centaines d'images pour en sélectionner une bien, mais qu'on ne fera pas ça à l'écrit - ça demande trop de temps).

Là où je te rejoins, c'est que pour la pub et les illustrations en général, c'est clair que l'IA est une menace par rapport au travail humain...

... mais justement, n'est-ce pas précisément parce que dans ce milieu pro (création d'illustrations, design de logos, etc.), il y a une déjà une forme de "mécanisation" du travail humain à l'oeuvre depuis des décennies? En clair, si l'humain imite la machine pour produire des illustrations à la pelle, est-ce bien étonnant d'être bluffé ensuite par une machine qui imite l'humain qui imite une machine?

 

 

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Je lâche mes two cents vis-à-vis de tout ça parce que je suis d'accord avec un peu tout le monde et je me vois pas vous répondre individuellement pour une fois :ph34r:

Je dirai que je suis assez profondément tiraillé entre mon amour de la technologie, ma fascination pour la nouveauté et le progrès... Et mon respect pour les artistes, mon admiration pour les oeuvres tantôt belles, tantôt créatives et originales, tantôt génératrices de réflexions pertinentes. Le milieu de l'art est déjà profondément difficile et injuste. Et le mainstream noit déjà tellement de projets fabuleux, inventifs, bizarres, hors-du-commun... Ce serait dommage de rajouter en plus une floppée de contenus générés en deux temps trois mouvements par l'IA. Ce serait le coup de grâce pour ces artistes de l'ombre, dont on ne parle déjà pas assez. 

Je peux pas prétendre que je ne suis pas impressionné par ChatGPT et d'autres programmes du même acabit. Je suis même souvent bluffé, et je trouve ça parfois utile, parfois intéressant et parfois même juste beau ou amusant. Je ne peux prétendre vouloir que cette technologie soit détruite, mais je ne souhaite pas non plus qu'elle supplante l'aspect humain de l'art. Parce que c'est rarement (dans l'idéal du moins) une question de sous. Vouloir faire de l'art, c'est vouloir s'exprimer. Vouloir raconter des choses. Il y a un aspect cathartique derrière. Bien sûr que je serai enchanté d'avoir un flot continu de musiques générées par l'IA pour accompagner mes sessions de travail, où la musique ne sert que d'habillage sonore. Mais est-ce que je renoncerai à des musiques torturées, où l'artiste expose ses tripes, dévoile sa sensibilité? Putain non. J'ai envie de croire que les deux peuvent coexister... Mais l'industrie culturelle fonctionnant déjà tellement sur base de ce qui marche, ça ne m'étonnerait pas qu'ils visent à "produire" des albums à partir de l'IA pour faire encore plus de sous à moindre frais. 

Je travaille beaucoup à partir de "writing prompts" (de pitchs quoi). L'inspiration vient rarement de nulle part, et ça m'aide à canaliser mes pensées d'avoir des sortes de canevas, de "règles" limitant ma créativité pour mieux la décupler. Je me dis que l'IA pourrait servir à ça aussi : servir de base pour aller plus loin. C'est plus naze si on s'en serre de façon malhonnête en vendant ça comme une création propre. 

Je vois aussi d'autres usages potentiels. Je repense par exemple à ce cas récent d'une classe qui a rendu des travaux réalisés par ChatGPT, mais aussi à d'autres usages plus utiles ! Dans mon domaine, on a des sueurs froides à l'idée que l'IA puisse remplacer les journalistes... Mais je crois au contraire que ça pourrait être un formidable outil (on en avait déjà parlé il y a quelques mois!). D'une part, l'IA ne pourra jamais réaliser un reportage, mener une interview, faire du boulot "de terrain". D'autre part, le souci actuel réside justement dans la recherche du scoop, la rapidité de l'information. Ce qui compte n'est pas de faire des articles fournis, des articles recherchés et complets... Le but c'est de le sortir avant tout le monde, quitte à ce que l'article soit flou, approximatif, trop court, ou carrément faux ! Et ce besoin d'alimentation constante du fil info demande une réactivité constante des journalistes, qui ne peuvent alors exercer leur profession correctement. J'avais lu pas mal de témoignages de journalistes frustrés de ne pas pouvoir faire + de terrain, de recherche, de journalisme d'investigation ou d'enquête précisément parce qu'ils n'en ont plus les moyens (financiers ou temporels). Or, si une IA peut s'occuper des chiens écrasés, des petits faits divers où quelques lignes seulement sont nécessaires (parfois pompées sur d'autres sites en plus), ça laissera plus de temps aux journalistes de s'occuper des vrais gros sujets! Même si, connaissant la tendance actuelle, ça servira sans doute plutôt à réduire les équipes et gagner de l'argent plutôt que de permettre un meilleur journalisme...

Désolé, je m'emmêle les pinceaux comme d'habitude, mais tout ça pour dire que je ne vois pas l'IA forcément d'un mauvais oeil. En fait, je suis même profondément admiratif de cette technologie. Mais je suis tellement persuadé qu'on l'utilisera pour les mauvaises raisons que j'en ai forcément peur. Elle pourrait tellement aider l'humanité (même sur des choses simples : il parait que ChatGPT peut donner des conseils pour faire un régime ou suivre un programme sportif par exemple!), mais on va juste s'en servir pour faire de la maille. Voire à des fins plus sombres encore. 

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Je viens d'écrire le scénario du siècle avec ChatGPT :

Citation

La trame de base reste la même que dans l'original, avec un groupe de criminels prenant en otage les personnes présentes dans un gratte-ciel de la ville de Paris, le personnage d'Elie Semoun, "John McClane" se trouve être l'un des otages et doit utiliser ses talents d'improvisation et son courage pour sauver sa famille et les autres otages.

 

Dans ce remake, John McClane est un facteur français qui est en visite à Paris pour des vacances. Il se rend compte qu'il a oublié son téléphone portable dans un café à côté de l'immeuble où il se trouve. Il décide d'entrer dans le gratte-ciel pour aller le récupérer. C'est alors qu'il se retrouve pris au milieu d'une prise d'otages par un groupe de criminels qui cherchent à voler la fameuse Renault Alpine de Jacques Chirac qui est exposée dans l'immeuble. John ne connaît personne dans l'immeuble, mais il doit utiliser son courage et son ingéniosité pour infiltrer le groupe de criminels et sauver les otages, y compris sa propre vie, et empêcher les criminels de voler la voiture.

 

Il y a des scènes d'action intenses avec des combats à mains nues et des fusillades épiques dans les étages du gratte-ciel. Le film met également en évidence les talents comiques d'Elie Semoun en utilisant des moments de comédie pour détendre l'atmosphère tendue de la prise d'otages.

 

Si avec ça, j'ai pas l'Oscar... Prends ça, @Mitth'raw Nuruodo !

 

EDITH : par contre, pas hyper à l'aise avec les dates le bouzin...

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Edited by Adios234
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Déjà que j'avais du mal à me remettre de "la fameuse Renault Alpine de Jacques Chirac", il termine avec "détendre l'atmosphère tendue de la prise d'otage" et ça m'a perdu. 

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  • 3 months later...

Tenez, s'il y en a qui veulent se faire une idée du style de mon roman en cours, je poste temporairement cet extrait, qui peut à peu près se lire à part, je pense. Ce sera plus représentatif que mes vieilles fan-fics^^ Ça se passe dans un univers fantasy médiéval. L'histoire est centrée sur la quête de l'héroïne accompagnée de peu de personnages mais pas dans un registre heroic fantasy, c'est plus proche de Tanith Lee et Clark Ashton Smith. Éliba a été engagée par les autres personnages comme guide. Il y a un contexte politique et guerrier développé autour d'eux mais ils ne s'y engagent pas.

 

(De l'héroïne de l'histoire, hein, je ne parle pas de la recherche de farine 👀)

 

Révélation

Nephtys, Ébrard et Horu quittèrent la cité dans l’après-midi avec Éliba.

Lorsqu’ils franchirent les remparts de la ville, ils traversèrent les misérables camps construits autour de celle-ci par des malheureux fuyant les ravages des guerres ; Nephtys sentit que l’endroit était saturé de peur, de colère et de désespoir. Une forte troupe de mercenaires payés par le Comte de Mikala s’assurait que les caravanes de marchands puissent quitter la ville sans être inquiétées mais en vérité, Nephtys percevait que la plupart des gens étaient trop abattus et trop choqués pour tenter quoi que ce soit. Sentant que les émotions négatives la submergeaient, elle ferma son esprit jusqu’à ce qu’Éliba les emmène le long d’un sentier qui s’élevait au-dessus de la ville.

Les montagnes d’Albios étaient jeunes ; elles étaient encore hautes et cruelles.

Nephtys exulta dès qu’ils s’y engagèrent. L’âpre dénivelé obligeait son corps à lutter, l’immensité acérée des sommets la fascinait.  Elle fut surprise par l’étendue luxuriante des forêts, elle aima leur obscurité protectrice ; toutefois elle les trouva trop agitées par la vie lorsqu’ils s’y engagèrent. Cette vie n’était pas seulement végétale et animale : Nephtys voyait également aller et venir des silhouettes obscures irradiant d’une lueur blafarde ; elle supposa que c’étaient des djinns.

Éliba devisait avec Horu et Nephtys -les réponses évasives d’Ébrard l’avaient dissuadée de poser trop de questions à ce dernier, bien qu’il l’écoutât avec attention. Horu parlât un peu de lui, disant être originaire du nord-est de Lovis, à la frontière de l’Aguemein, sans dire un traître mot de ses activités à Althezyân ; Nephtys n’avait aucune idée de si ce qu’il disait était vrai mais Éliba sembla en tout cas trouver son récit crédible. Cependant, c’était bien sûr Nephtys qui intriguait le plus la montagnarde : elle lui parlât avec grand plaisir de sa vie dans l’Empire kovakhâr et de l’histoire de celui-ci, esquivant en revanche toutes les questions sur les raisons pour lesquelles elle avait entrepris ce voyage. En retour, Éliba parlait d’elle. Elle avait vécu trente ans dans ces montagnes jusqu’à la mort de son mari éleveur, et vivait à présent du commerce d’étoffes entre les villages des montagnes et Mikala, seule. D’après ce qu’elle disait, elle savait lire, ce qui surprit Ébrard mais pas Nephtys, qui ne connaissait pas le nord.

À la fin de la journée, ils avaient atteint des hauteurs où la vie se raréfiait, balayées par les vents ; suivant les recommandations d’Éliba, Nephtys enfila comme elle un pelisson pour se protéger de leur morsure glaciale, elle n’aimait pas l’aspect de la fourrure mais celle-ci restait dissimulée sous sa cotte teinte en rouge par la garance. Ébrard s’habilla d’un épais manteau de bure en grommelant. Seul Horu paraissait ne pas souffrir du froid. Lorsque le soir tomba, Éliba les emmena s’abriter dans un village où on leur offrit l’hospitalité sans difficulté. Fourbue, Nephtys s’effondra à peine après que le soleil soit tombé dans le gouffre au-delà de la plaine jaune à l’ouest du monde.

 

Plusieurs jours de voyage s’écoulèrent, paisibles et éreintants.

La plupart du temps, les voyageurs ne trouvaient pas de village pour les accueillir le soir ; ils cherchaient alors un endroit aussi abrité que possible, faisaient du feu et s’installaient tant bien que mal sous une tente. Au matin, Nephtys était réveillée avant que le soleil ne franchisse la plaine verte à l’est du monde par Horu ; après qu’ils se soient éloignés pour être sûrs de n’être pas entendus d’Éliba, il lui faisait pratiquer ses exercices de magie, elle apprenait à sentir l’ombre partout autour d’elle et à s’en servir tant pour communiquer avec les êtres vivants que pour déplacer des objets, elle sentait qu’elle commençait à la contrôler et à se comprendre ; ensuite, Ébrard insistait pour qu’elle s’entraîne à se battre à l’épée avec lui, ses réflexes étaient mauvais mais elle y mettait une discipline qui impressionnait l’espion. Pendant ce temps, Horu et Éliba partaient généralement chercher de quoi manger, des baies et parfois de petits animaux qu’ils faisaient cuire ensuite, avant qu’ils ne se remettent en route. La traversée des montagnes était pénible et, comme Éliba les en avait avertis, parfois dangereuse : Nephtys veillait à suivre scrupuleusement les consignes de la guide, d’autant qu’elle souffrait du vertige. Elle commençait à être éprouvée par l’effort musculaire et la monotonie, mais elle n’en dit rien.

Il n’y avait en revanche rien à craindre de la vie animale, contrairement à ce que redoutait Nephtys : les quelques loups qu’ils aperçurent les regardèrent passer sans leur chercher querelle, du reste ils ne rencontrèrent qu’un troupeau de vaches et quelques agiles animaux cornus que Nephtys ne connaissait pas et qui les observaient de loin.

Une nuit, Nephtys se réveilla en proie à une angoisse soudaine. Elle avait les idées si embrumées qu’elle se dressa en tremblant sous la tente, le cœur battant la chamade, prête à se battre comme si elle attendait un ennemi. Au bout de plusieurs minutes, elle se rappela où elle était. Tout était tranquille autour d’elle, et pourtant l’angoisse persistait. Elle comprit qu’elle avait rêvé qu’elle était de retour dans la prison d’Althezyân, attendant le lendemain qui viendrait la brûler. La peur reflua en elle, mais il s’y substitua une étrange mélancolie : elle réalisa qu’Althezyân, son peuple, son père et ses quelques amis lui manquaient, et qu’elle ne croyait pas pouvoir les revoir ; à présent que le sentiment d’urgence et le plaisir de découvrir de nouvelles contrées étaient passés, elle mesurait ce qu’elle avait perdu. Les gens autour d’elle l’avaient toujours trouvée solitaire, étrange, contemplative ; mais à présent elle réalisait qu’elle était tout de même attachée à eux, et cette pensée lui rongeait le cœur. Cette expédition dans les montagnes lui paraissait maintenant interminable ; sa quête pour trouver le Grand Assembleur, absurde.

Il ne fallait pas qu’elle reste là. Elle ne tenait pas en place, pas avec ces idées qui agitaient son cœur et son ventre. Elle se leva, s’efforçant de faire le moins de bruit possible, et quitta la tente. La nuit était calme, au-dehors, à peine entendait-elle le vent dans les arbres et les animaux nocturnes qui vaquaient à leurs occupations. La lune était pleine, irradiant tout de sa lueur irréelle. Nephtys se mit à marcher, sans but. Une silhouette apparut sur une éminence à proximité : il s’agissait d’un de ces animaux qu’elle avait déjà aperçus de jour ; il donnait l’impression d’observer la jeune femme. C’était un quadrupède haut d’un peu moins d’un mètre, avec un long museau et d’épaisses cornes qui s’enroulaient en spirale autour de sa tête, de longues pattes et un ventre qui pendait légèrement entre elles ; ceux qu’elle avait aperçus de jour avaient la fourrure brune, néanmoins cet animal-ci lui parut entièrement noir à la lumière de la lune. Elle tenta de s’approcher ; à sa grande surprise, la bête ne chercha pas à s’éloigner en l’apercevant. Ce fut seulement lorsqu’elle put presque le toucher que l’animal s’écarta d’elle d’un bond leste, puis il descendit en courant la pente qui descendait de l’autre côté de la hauteur. Toutefois, il s’arrêta ensuite, regardant toujours l’humaine au-dessus de lui.

« Eh bien, tu veux que je te suive ? murmura Nephtys.

Elle descendit la pente à son tour, doucement, pour voir comment l’animal réagirait. De nouveau, il la laissa approcher, puis bondit lorsqu’elle fut presque à sa portée, revenant vers les bois. Il s’arrêta à nouveau, la regardant toujours.

— Eh bien c’est d’accord, je te suis, alors, conclut Nephtys.

Elle suivit la bête cornue qui, sans surprise, l’entraîna plus loin, s’aventurant dans la forêt. Nephtys commença à s’inquiéter de comment elle regagnerait le camp, cependant elle se rassura vite : elle pensait avoir atteint une maîtrise suffisante pour localiser la présence psychique de ses compagnons. L’animal noir lui fit traverser un bout de forêt : de l’autre côté des arbres, elle vit un lac, la lumière de la lune se reflétant sur son étendue paisible et profonde. Le quadrupède l’attendait au bord de la rive. Lorsque Nephtys le rejoignit, il ne fit cette fois pas mine de partir : il la regarda avec un petit soufflement, comme un rire, puis tourna sa tête cornue vers l’eau. Nephtys tendit la main vers lui : l’animal se laissa caresser.

On dirait un mouton, en fait. Un mouton noir et cornu. Un parent sauvage ?

— C’est ici que tu voulais m’amener, c’est ça ? 

Elle fixa son regard sur l’eau, comme lui.

Elle tressaillit.

Quelque chose d’inexplicable se reflétait dans l’eau. Elle voyait des lumières qui n’étaient pas celles d’étoiles mais de torches, et l’image des bâtiments de ce qui lui paraissait être une grande ville septentrionale, plus massifs que ceux de Mikala. Il lui paraissait même que des silhouettes sombres allaient et venaient entre eux. Tout cela paraissait vu à une grande distance et donc réduit, mais c’était bien là. Lorsqu’elle tourna sa tête vers les cieux, il n’y avait évidemment rien qui puisse projeter un tel reflet. Elle regarda de nouveau la cité impossible, fascinée.

À côté d’elle, l’ovin s’allongea au sol et bêla, fixant toujours l’eau. Nephtys n’arrivait plus à détacher son propre regard de la surface aquatique, cherchant à discerner les détails des édifices et des personnages. Elle rêvait, c’était sûr. Mais c’était un très beau rêve. À présent, il lui semblait qu’elle dormait effectivement, car une torpeur s’abattait sur son corps. Peut-être était-ce paradoxalement le signe qu’elle allait se réveiller. Mais où se réveillerait-elle ? Dans la tente ? Dans sa cellule d’Althezyân ? Ou peut-être à Istyân, si rien de tout cela n’était vrai… ou peut-être se réveillerait-elle justement dans cette cité dont elle apercevait le reflet sans rien pour le projeter, oui, maintenant ce reflet lui paraissait plus réel que la réalité… La cité se rapprochait à mesure qu’elle la fixait, les bâtiments prenaient plus de place dans son champ de vision et se faisaient plus nets. Nephtys ne voyait même plus la déformation induite par les rides de l’eau. Elle ne sentait plus vraiment son corps non plus, la cité semblait tout éclipser. Tout continuait à se rapprocher, elle serait bientôt dans la rue… Elle voyait les silhouettes qui se rapprochaient d’elle…

— NEPHTYS ! 

Un cri soudain, qui rompait le rêve ; on l’attrapait, on la saisissait vigoureusement par les bras, on la tenait fermement et on la secouait, pourtant la cité était toujours là. On l’appelait encore, la giflait même. Nephtys ouvrit brusquement les yeux, qu’elle n’avait pas conscience d’avoir fermés. Horu la tenait et l’observait avec une inquiétude manifeste.

— Que s’est-il passé ? demanda-t-elle, hébétée.

Elle était bien au bord d’un lac mais Horu, Éliba et Ébrard l’entouraient tous trois, stupéfaits. Lorsque Horu la lâcha, elle ne vit ni ovin, ni reflet dans l’eau autre que celui du ciel étoilé.

— Je te retourne la question, dit le magicien, tu nous as faussé compagnie en pleine nuit… Que faisais-tu ici, au bord de l’eau ?

— J’ai suivi… un animal, il m’a invitée à le suivre.

— Comment ça, tu…

— Quel animal ? coupa Éliba d’un ton pressant.

— Je ne sais pas comment ça s’appelle, il ressemblait à d’autres que nous avons vu pendant le voyage, une sorte de mouton avec des cornes. Il m’a amenée ici et il y avait… le reflet d’une ville dans le lac…

— Tu as suivi le Mouflon noir, inféra Éliba d’un ton lourd de signification. Celles et ceux qui le suivent s’endorment au bord du lac et ne se réveillent jamais ; heureusement qu’Horu t’a retrouvée… Partons vite, il ne fait pas bon s’attarder ici.

Ils obtempérèrent.

— Qu’est-ce que ce Mouflon noir, exactement ? demanda Nephtys sur le chemin, merveilleusement effrayée. Une sorte de djinn ?

— C’est peut-être un génie, oui, ou peut-être une entité d’une autre sorte, plus dangereuse. Les gens de Mikala ne me croient pas, quand j’en parle. Personne ne sait ce que devient l’esprit de celles et ceux qu’il a entraînés.

— Mais alors il ne leur arrive pas forcément quelque chose de mauvais ?

— Peut-être, peut-être pas. La seule chose sûre, c’est qu’ils ne sont plus de ce monde.

— Et il y a d’autres périls comme celui-ci, dans les Albines ?

— Il y en a partout. Chaque lieu a ses démons. »

 

(Promis, cette fois c'est pas ChatGPT)

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Le 14/05/2023 à 15:05, Mitth'raw Nuruodo a dit :

Tenez, s'il y en a qui veulent se faire une idée du style de mon roman en cours, je poste temporairement cet extrait, qui peut à peu près se lire à part, je pense. Ce sera plus représentatif que mes vieilles fan-fics^^ Ça se passe dans un univers fantasy médiéval. L'histoire est centrée sur la quête de l'héroïne accompagnée de peu de personnages mais pas dans un registre heroic fantasy, c'est plus proche de Tanith Lee et Clark Ashton Smith. Éliba a été engagée par les autres personnages comme guide. Il y a un contexte politique et guerrier développé autour d'eux mais ils ne s'y engagent pas.

A quand la suite? 😊

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Il y a 8 heures, roussine a dit :

A quand la suite? 😊

 

Quand je l'aurais écrite, pour commencer, mais j'espère surtout pouvoir répondre que c'est en librairie un jour^^

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il y a 24 minutes, Mitth'raw Nuruodo a dit :

 

Quand je l'aurais écrite, pour commencer, mais j'espère surtout pouvoir répondre que c'est en librairie un jour^^

J'espère que tu nous préviendras car tu as réussi à piquer ma curiosité 😁

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Le 14/05/2023 à 15:05, Mitth'raw Nuruodo a dit :

Il ne fallait pas qu’elle reste là.

 

qu'elle restât là ;)

 

Donc si je comprends bien, compter un seul mouton cornu mène au sommeil éternel. C'est noté!

 

Plus sérieusement, chouette extrait. Descriptions pile poil de la longueur qu'il faut pour moi. Tu sais comme j'ai tendance à préférer les trucs un peu incisifs. ^_^ Mais là, j'aime beaucoup parce que ça reste bien fluide malgré le combo nom + adjectif qui revient souvent.

 

Je donne juste un exemple pour clarifier: 

 

Le 14/05/2023 à 15:05, Mitth'raw Nuruodo a dit :

L’âpre dénivelé obligeait son corps à lutter, l’immensité acérée des sommets la fascinait.  Elle fut surprise par l’étendue luxuriante des forêts, elle aima leur obscurité protectrice ; toutefois elle les trouva trop agitées par la vie lorsqu’ils s’y engagèrent.

 

Je précise que c'est pas un défaut en soi, t'inquiète. C'est juste que ça crée toujours une forme de monotonie. Or, quand on veut décrire quelque chose d'époustouflant, ou qui sort de l'ordinaire, ça peut être bien de surprendre aussi par la syntaxe. Mais là, ça passe. ;)

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Il y a 8 heures, LudicrousC a dit :

qu'elle restât là ;)

 

Ah oui, en effet, ça sonne étrangement mais j'en mets bien ailleurs.

 

Il y a 8 heures, LudicrousC a dit :

Donc si je comprends bien, compter un seul mouton cornu mène au sommeil éternel. C'est noté!

 

Un seul mouflon, ce n'est pas la même espèce même si c'est proche ;) Mais oui, voilà :lol:

 

Je m'étais inspiré de ce tableau d'Albert Bierstadt, que j'aime énormément :

 

Révélation

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S'il y en a qui aiment ce genre de choses, je ne saurais trop recommander la page facebook Dark and fantastic art, c'est magnifique, je suis archi-fan. En général, ce sont plutôt des tableaux XIXème mais il lui arrive aussi de poster de la peinture expressionniste, et plus rarement d'autres types de documents.

 

Il y a 8 heures, LudicrousC a dit :

Plus sérieusement, chouette extrait. Descriptions pile poil de la longueur qu'il faut pour moi. Tu sais comme j'ai tendance à préférer les trucs un peu incisifs. ^_^ Mais là, j'aime beaucoup parce que ça reste bien fluide malgré le combo nom + adjectif qui revient souvent.

 

Je précise que c'est pas un défaut en soi, t'inquiète. C'est juste que ça crée toujours une forme de monotonie. Or, quand on veut décrire quelque chose d'époustouflant, ou qui sort de l'ordinaire, ça peut être bien de surprendre aussi par la syntaxe. Mais là, ça passe. ;)

 

Ah, merci ! Je vois ce que tu veux dire. En l'occurrence, le parallélisme est volontaire dans la première phrase, j'aime bien le rythme créé par la répétition de la construction, mais c'est vrai qu'avec la suivante, ça fait beaucoup, d'autant plus que j'utilise souvent cette construction. Il va falloir que je fasse gaffe, c'est le genre de trucs auxquels je n'ai pas l'habitude de faire attention.

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Il y a 1 heure, Mitth'raw Nuruodo a dit :

Ah oui, en effet, ça sonne étrangement mais j'en mets bien ailleurs.

 

Ah oui. -_- C'est toujours le problème quand on écrit au passé simple à la place du passé composé. Le premier est bien plus littéraire, mais il lui faut son subjonctif imparfait infernal, surtout si on a un narrateur plus ou moins omniscient.

 

Il y a 1 heure, Mitth'raw Nuruodo a dit :

S'il y en a qui aiment ce genre de choses, je ne saurais trop recommander la page facebook Dark and fantastic art, c'est magnifique, je suis archi-fan.

 

Likée depuis que tu en as parlé. :) Il y a des trouvailles surprenantes des fois!

 

Il y a 1 heure, Mitth'raw Nuruodo a dit :

Ah, merci ! Je vois ce que tu veux dire. En l'occurrence, le parallélisme est volontaire dans la première phrase, j'aime bien le rythme créé par la répétition de la construction, mais c'est vrai qu'avec la suivante, ça fait beaucoup, d'autant plus que j'utilise souvent cette construction. Il va falloir que je fasse gaffe, c'est le genre de trucs auxquels je n'ai pas l'habitude de faire attention.

 

Je trouve que c'est souvent ça, le marqueur le plus facilement identifiable du style: comment on gère la syntaxe, ainsi que la ponctuation. Il y a évidemment d'autres trucs, dont pas mal qui sont difficiles à formuler (après tout, on s'adresse davantage au ressenti quand on parle du style d'un auteur ou d'une autrice), mais la syntaxe qui s'accorde bien au propos, ça peut faire la touche en plus.

 

Pour ça que les passages descriptifs que j'ai du mal à bien rédiger, je les lis à haute voix, plusieurs fois, exactement comme quand on veut travailler la prosodie d'un poème. Comme ça, on entend tout de suite où il faut tailler.

 

Ceci dit, si on cherche à adopter un style plus "stream of consciousness" ou à la Proust, c'est peut-être pas un bon conseil à suivre. ^_^

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Il y a 7 heures, LudicrousC a dit :

Je trouve que c'est souvent ça, le marqueur le plus facilement identifiable du style: comment on gère la syntaxe, ainsi que la ponctuation. Il y a évidemment d'autres trucs, dont pas mal qui sont difficiles à formuler (après tout, on s'adresse davantage au ressenti quand on parle du style d'un auteur ou d'une autrice), mais la syntaxe qui s'accorde bien au propos, ça peut faire la touche en plus.

 

J'ai l'habitude de varier ma ponctuation, typiquement passer à des phrases courtes pour décrire par petites touches malsaines une atmosphère glauque tandis que je reste sur de la phrase longue quand j'ai besoin de plus de lyrisme, d'actions ou de pensées enchevêtrées les unes dans les autres, mais je surveille moins la syntaxe, j'avoue.

 

Il y a 7 heures, LudicrousC a dit :

Pour ça que les passages descriptifs que j'ai du mal à bien rédiger, je les lis à haute voix, plusieurs fois, exactement comme quand on veut travailler la prosodie d'un poème. Comme ça, on entend tout de suite où il faut tailler.

 

Oui, je lis à haute voix aussi, mais plutôt pour le rythme. On se rend vite compte qu'il y a des phrases qui sont tout simplement insoutenables :rolleyes:

 

Il y a 7 heures, LudicrousC a dit :

Ceci dit, si on cherche à adopter un style plus "stream of consciousness" ou à la Proust, c'est peut-être pas un bon conseil à suivre. ^_^

 

Qu'est-ce que tu entends par flux de la conscience (si je traduis bien), exactement ? En tout cas, à l'époque de mes fan-fics, j'étais très branché point de vue interne, avec une écriture qui suivait les pensées des personnages, et j'y reviendrai peut-être un jour, mais sur La Mort vivante j'utilise davantage le point de vue omniscient et donc un style plus écrit, et c'est encore beaucoup plus vrai pour ce roman-ci.

 

Je n'ai jamais lu Proust à ce jour -je suis fâché avec la littérature classique :rolleyes: Ce qui ne m'empêchera sans doute pas de jeter un œil à celui-ci et d'autres quand je serai venu à bout des Thibault (très bien, d'ailleurs). En tout cas, mon modèle stylistique, maintenant, c'est Tanith Lee, parce que ce genre de passages, citoyennes et citoyens, ça vaut tout l'or de ce monde-ci et des autres :

 

Révélation
Dans Ne-Me-Mords-Pas ou, Fleur de feu, l'une des nouvelles du recueil Écrit avec du sang :

"Il est, bien que captif, impérieux. S'il était un lion ou un taureau, ils admireraient sa "noblesse". Mais le fait est qu'il ressemble trop à un homme, ce qui sert à souligner ses différences surnaturelles de manière insupportable.
Évidemment, Feroluce comprend l'essentiel de sa critique situation. Les ennemis le tiennent captif. Il est un spectacle pour l'instant, mais il sera finalement tué, car avec l'intuition du ravisseur il devine tout. Il avait pensé que le soleil le tuerait, mais c'est une préoccupation éloignée maintenant. Et au-delà de tout, les voix, et les voix des ailes de sa parentelle battent l'air au-dehors de cette montagne de pierre dont les grottes sont des salles.
Et ainsi, Feroluce commence à chanter, ou du moins, c'est ce qu'il semble à la cour enragée massée dans la salle. Il semble qu'il chante. C'est le grand cri de rassemblement de sa race, l'art, la science et la religion des vampires ailés, sa façon de leur dire, ou de tenter de leur dire, ce qu'ils doivent entendre avant qu'il meure. Ainsi avait chanté le père de Feroluce, et son grand-père, et chacun de ses ancêtres. En général ils étaient morts en vol, des anges tombant en vrille le long des ravins et des énormes escaliers de pics lointains, en chantant. Feroluce, emmuré, croit que son cri est, d'une manière ou d'une autre, audible.
Pour la foule dans la salle du Duc la chanson est principalement cela, une chanson, mais ô combien glorieuse. La voix d'argent sombre, se changeant en bronze ou en or, devenant blanche dans les registres plus aigus. Il semble y avoir des paroles, mais dans une autre langue. C'est ainsi que chantent les planètes, sûrement, ou les mystérieuses créatures de la mer.
Tout le monde est stupéfié. Ils écoutent, ébahis.
Maintenant personne ne fait de remontrances à Rohise lorsqu'elle se lève et descend de l'estrade. Il y a un enchantement qui empêche tout mouvement et pensée cohérente. De tous les présents, elle est la seule à être attirée en avant. Alors elle s'approche, sans encombres, et entre les barreaux de la cage, elle voit le vampire pour la première fois.
Elle n'a aucune idée de ce qu'il peut être. Elle imaginait qu'il était un monstre ou une bête hideuse. Mais il n'est ni l'un ni l'autre. Rohise, privée si longtemps de beauté et en rêvant encore, reconnaît Feroluce comme faisant inévitablement partie du rêve devenu réalité. Instantanément, elle l'aime. Parce qu'elle l'aime, elle n'a pas peur de lui."
 
Dans Le Maître de la Mort, le deuxième tome du Dit de la Terre plate :
 
"Il lui sembla voir un monde plus jeune dont les montagnes touchaient le ciel. Il lui sembla voir le déluge qui abattait tout, l'humanité avec le reste. Puis vint le rêve de magie, dans lequel il lui sembla vivre et se déplacer dans le corps d'autrui, éprouver leurs souffrances et leur gloire, et connaître leurs chagrins et leurs ambitions.
Leur cruauté et leur orgueil creusèrent des sillons profonds dans sa propre cruauté latente et son orgueil en sommeil. Son crâne chanta. Il pratiqua la thaumaturgie, la nécromancie, jeta des sorts de fascination, d'embellissement et de malheur, prononça des incantations, appela des élémentaires et les renvoya aussitôt. Ses doigts craquaient. Il écrivit sur des parchemins, dans de grands livres ; il sculpta dans le marbre et dans le sable même les runes du pouvoir et les mathématiques du destin. Tout cela lui venait aussi sûrement qu'un feu qui fondait et qu'un moule qui se reformait, une altération de son esprit et de son cœur, ou peut-être une simple découverte. Et ce qu'il découvrit fût sa propre méchanceté, la noirceur de son âme, que possèdent toutes les âmes. Et il se serra contre elle, l'enlaça, tel un unique pilier debout dans une maison en ruine, tandis que l'emplissaient les mobiles des méchants qui l'avaient précédé, avec tout leur art. Il fut bourré de leur savoir, de leurs mystères et de leurs merveilles. Les philtres se mêlaient sous ses mains, les pierres bondissaient devant sa volonté. Ils étaient mille ou davantage à être passés avant lui, et ils lui abandonnaient maintenant tout ce qu'ils savaient.
Le cerveau de certains, dans la chambre de l'image, avait explosé, et ils étaient ressortis fous, ou ils étaient morts. Mais lorsque les deux moitiés vert-de-grisées s'écartèrent pour le laisser sortir, Jirem était magicien."
 
Dans Vivia, en VO :
 
"By the glow of the phosphorus, Vivia gazed at the grotto under the castle. At first it seemed the same to her.
The falls of water, thin and thick, the gemmy pools, some suddenly ringed by the diving of an albino frog. The stalactites stabbled down, and in the walls of stone, the fossils were stacked : fans of shells and curled ammonites, the skeletons, slender as hairs, of fishes, lizards, birds. It was quiet, but for the harping of liquid, the intermediary slight ventures of indeginous things.
Then, she noticed that some of the water which fell was black. It siphoned through slowly, as if wanting to be sure of, or to tease, the region it entered.
And next, Vivia saw that the walls in some parts moved.
Bats crawled down the stone. Hundreds of them. Portable darkness. They felt their way with agile, delicate hooked wings, and the fur of their bodies sparkled with cold dew. Their eyes sparkled in a different way, more glutinous yet half opaque. They winked at her. Tiny teeth showed, flawless white. And then the grey tongues, licking and licking at the black fluid which dropped so hesitantly from above.
Blood. It was blood. Somehow seeping through from the doomed castle overhead. Through curious channels, unknown tubes of stone.
It spangled down, and the quiet calm bats lapped. Their tongues turned black.
Vivia stood as if petrified."

 

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Il y a 2 heures, Mitth'raw Nuruodo a dit :

En tout cas, mon modèle stylistique, maintenant, c'est Tanith Lee, parce que ce genre de passages, citoyennes et citoyens, ça vaut tout l'or de ce monde-ci et des autres :

 

J'ai lu viteuf l'extrait mais du coup, tu aimes beaucoup le rythme ternaire, non? C'est vrai que pour les envolées lyriques, il fonctionne bien.

 

 

Il y a 2 heures, Mitth'raw Nuruodo a dit :

mais je surveille moins la syntaxe, j'avoue.

 

C'est vrai qu'on y pense pas toujours car on estime que ça va de soi. Mais il suffit de revenir  à ta phrase que je citais en exemple: placer âpre devant dénivelé, ça sonne mieux à l'oreille, parce que l'adjectif est court et on l'entend souvent dans cette position-là. Mais c'est aussi le seul adjectif placé devant le nom dans cette phrase. Tu aurais le même sens avec "Le dénivelé abrupt" mais tu as opté pour une meilleure incisive avec un adjectif dès le début de la phrase (peut-être parce que tu préfères dire âpre ici), et aucun adjectif épithète à la fin (ça évite la monotonie).

Mais peut-être que tu appelles ça juste le rythme de la phrase. Et d'une certaine manière, ça en fait partie.

 

Il y a 3 heures, Mitth'raw Nuruodo a dit :

Qu'est-ce que tu entends par flux de la conscience (si je traduis bien), exactement ?

 

La technique littéraire du courant de conscience. (Aussi appelé flux de conscience, oui.) Si tu connais un peu la littérature anglophone, c'est le style de James Joyce, William Faulkner et de Virginia Woolf. En résumant très rapidement, c'est un travail minutieux de la syntaxe et de la ponctuation, pour se rapprocher au plus près du mécanisme de la pensée (si celle-ci pouvait être reproduite à l'écrit sous forme de monologue intérieur). Par exemple, chez Joyce, c'est le choix de faire disparaître des éléments de ponctuation qu'on verrait comme essentiels (points, guillemets). Chez Faulkner, c'est des sauts dans le temps justifiés par l'utilisation d'un mot.

Je dirais que dans la littérature francophone, c'est Proust et ses phrases de 3 pages qui s'en rapprocherait le plus.

Après, j'encourage pas nécessairement de lire du Proust. Perso, j'ai jamais pu venir à bout de sa Recherche - bien trop énergivore. Mais étudier Du Côté de Chez Swann (le premier tome) en prépa, ça a été une étape essentielle pour façonner mon style. Bien davantage que tous les autres "classiques" francophones. Un peu comme quand j'ai étudié Hemingway en licence puis fait mon mémoire de recherche sur Bret Easton Ellis. (A la petite différence que j'aime le style de ces deux derniers. ^_^ )

 

 

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Il y a 11 heures, LudicrousC a dit :

Je trouve que c'est souvent ça, le marqueur le plus facilement identifiable du style: comment on gère la syntaxe, ainsi que la ponctuation. Il y a évidemment d'autres trucs, dont pas mal qui sont difficiles à formuler (après tout, on s'adresse davantage au ressenti quand on parle du style d'un auteur ou d'une autrice), mais la syntaxe qui s'accorde bien au propos, ça peut faire la touche en plus.

 

Assez d'accord avec cette définition ! La syntaxe (et les figures de style - la métaphore surtout évidemment) donnent sa personnalité au texte car elles traduisent une manière particulière de voir le monde. Je n'invente rien, ça vient de Proust justement ce genre d'idées, mais c'est tellement juste je trouve. S'il n'y a pas cette particularité-là, ce truc qui te permet de reconnaître et de retrouver un écrivain d'un livre à l'autre, alors il peut y avoir de bonnes histoires, écrites dans un français correct, mais il n'y a pas vraiment de style. 

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Il y a 23 heures, LudicrousC a dit :

tu aimes beaucoup le rythme ternaire, non? C'est vrai que pour les envolées lyriques, il fonctionne bien.

 

À fond. J'aime aussi beaucoup ses métaphores et ses asyndètes. Je pratique abondamment les asyndètes également mais je suis assez mauvais pour les métaphores :unsure:

 

Il y a 23 heures, LudicrousC a dit :

C'est vrai qu'on y pense pas toujours car on estime que ça va de soi. Mais il suffit de revenir  à ta phrase que je citais en exemple: placer âpre devant dénivelé, ça sonne mieux à l'oreille, parce que l'adjectif est court et on l'entend souvent dans cette position-là. Mais c'est aussi le seul adjectif placé devant le nom dans cette phrase. Tu aurais le même sens avec "Le dénivelé abrupt" mais tu as opté pour une meilleure incisive avec un adjectif dès le début de la phrase (peut-être parce que tu préfères dire âpre ici), et aucun adjectif épithète à la fin (ça évite la monotonie).

Mais peut-être que tu appelles ça juste le rythme de la phrase. Et d'une certaine manière, ça en fait partie.

 

Oui, effectivement, c'est plutôt à ce titre que j'y réfléchissais, d'ailleurs j'avais essayé avec "abrupt" aussi mais en effet, je préférais "âpre" pour sa brièveté, sa connotation plus martiale et tout simplement le fait qu'il soit plus rare.

 

Il y a 23 heures, LudicrousC a dit :

Si tu connais un peu la littérature anglophone, c'est le style de James Joyce, William Faulkner et de Virginia Woolf. En résumant très rapidement, c'est un travail minutieux de la syntaxe et de la ponctuation, pour se rapprocher au plus près du mécanisme de la pensée (si celle-ci pouvait être reproduite à l'écrit sous forme de monologue intérieur).

 

Ah oui, merci, alors effectivement, ça m'est arrivé de tendre à cela, notamment à la fin d'une fan-fic où je m'adaptais aux pensées d'un personnage qui était devenu fou à lier, c'était assez amusant à écrire^^

Edited by Mitth'raw Nuruodo
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  • 5 weeks later...

Allez, je me lance @Mitth'raw Nuruodo !

 

Je passe rapidement sur l'enfance compliquée, le refuge dans l'écriture dès mes 10 ans (je voulais écrire la suite du Fléau de Stephen King, bizarrement ça sonnait pas terrible). 

Je n'ai jamais cherché à me faire publier mais j'ai rencontré à l'occasion d'une soirée la personne qui deviendra mon futur éditeur. 

Je vais être très cash et répéter ce qu'on m'a dit : les manuscrits envoyés par la poste sont très rarement lus, et les éditeurs considèrent, tellement ils en reçoivent, que si, en gros, tu n'as pas un minimum de relations et/ou de buzz, ça ne vaut même pas le coup de lire. 

Faut savoir que le milieu germanopratin de l'édition est un milieu de gros consanguins avec des auteurs qui sucent les journalistes qui eux mêmes sucent les éditeurs (rien à envier à la Suckbox). 
J'ai toujours su que la raison pour laquelle mon premier livre a été publié vient du fait que mon éditeur voulait me baiser (sorry encore une fois mais c'est la vérité), je n'en ai tiré absolument aucune fierté.
J'ai publié d'autres livres avec lui, et avec l'un d'eux, j'ai gagné le prix du "Mauvais Esprit" (mérité j'avoue) qui à l'époque était une tentative de Naulleau de promouvoir des "écrivains" pas connus. 
Là, comme je ne connaissais personne au jury, j'ai fini par me dire que j'étais legit. 

Et au dernier bouquin, sur Stephen King, ce cirque a fini par vraiment me fatiguer et j'ai arrêté de vouloir être publiée, ce qui m'empêche pas d'écrire. 

 

De mon expérience : le milieu de l'édition est pourri jusqu'au trognon. 
Mais si vous voulez parler de bouquins sur ce topic, volontiers !

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il y a une heure, AlexV19 a dit :

Je passe rapidement sur l'enfance compliquée, le refuge dans l'écriture dès mes 10 ans (je voulais écrire la suite du Fléau de Stephen King, bizarrement ça sonnait pas terrible). 

 

Bvouf, c'est hard d'attaquer Le Fléau à dix ans, quand même :lol: Je l'avais lu pendant la pandémie de grippe A, moi^^

 

il y a une heure, AlexV19 a dit :

Je vais être très cash et répéter ce qu'on m'a dit : les manuscrits envoyés par la poste sont très rarement lus, et les éditeurs considèrent, tellement ils en reçoivent, que si, en gros, tu n'as pas un minimum de relations et/ou de buzz, ça ne vaut même pas le coup de lire. 

Faut savoir que le milieu germanopratin de l'édition est un milieu de gros consanguins avec des auteurs qui sucent les journalistes qui eux mêmes sucent les éditeurs (rien à envier à la Suckbox). 

 

De nos jours, beaucoup d'éditeurs interdisent même de leur envoyer par la poste ou de leur en remettre à un salon, ils préfèrent le numérique. Après, je pense qu'il faut prendre en compte le côté "oligopole à franges" de l'édition, comme des autres industries culturelles : les gros éditeurs, qui sont presque entièrement concentrés entre les mains de Hachette et Éditis en France (Bolloré a failli devenir propriétaire des deux à la fois, normal...), plus Gallimard qui surnage grâce à son prestige, effectivement, je pense que c'est complètement consanguin avec la presse, d'ailleurs ils ont les mêmes propriétaires (Bolloré et Lagardère, donc) ; pour les quelques maisons indépendantes, je pense que c'est moins le cas, surtout pour les plus petites (les Éditions du Petit Caveau ou les Éditions luciférines n'ont sans doute pas les mêmes liens que Bragelonne), mais le problème, c'est qu'elles n'ont souvent pas de réseau de diffusion et de distribution, ou beaucoup moins efficaces :unsure:

 

Mon expérience en la matière, ce sont les refus assez rapides des grands éditeurs, les moyens (genre Le Bélial) qui répondent avec littéralement des années de retard sur les délais qu'ils se donnent eux-mêmes, et les petits qui n'ont généralement même pas le temps de répondre du tout tant ils sont submergés^^ Ce qui se comprend : L'Atalante avait indiqué avoir reçu plus de sept cent manuscrits en un mois... Il n'y a qu'un éditeur suisse qui a pris la peine d'écrire qu'il avait quand même apprécié l'originalité de l'histoire et le style^^

 

il y a une heure, AlexV19 a dit :

J'ai toujours su que la raison pour laquelle mon premier livre a été publié vient du fait que mon éditeur voulait me baiser (sorry encore une fois mais c'est la vérité), je n'en ai tiré absolument aucune fierté.

 

Décidément :rolleyes:

 

Ah, d'ailleurs : pour les gens qui ne connaissent pas, il y a le blog de Stoni sur le sujet ;) Bon, ça rend pas franchement optimiste^^

 

Pour l'édition, hein, pas pour sauter des écrivaines.

Edited by Mitth'raw Nuruodo
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